La Méditerranée m'a tuer

Comme dit dans un précédent article, la méditerranée a pour grande caractéristique d'être imprévisible.

Eh bien, cette fois-ci nous aurions du regarder une 346e fois la météo !


Tout commence simplement, nous quittons le superbe mouillage de Formentor, tout confiants et contents car une belle nav' se présage.

En passant le cap de Formentor, nous déchantons un peu, si le vent est, comme annoncé, portant vers notre cap, la houle par contre, elle était encore là, mais cette fois-ci, dans l'autre sens !

Donc compliqué de tenir les voiles car, la houle nous faisait valdinguer et nous faisait empanner régulièrement.

Empanner signifie que la bôme (la grosse barre qui tient la Grand Voile) passe d'un côté à l'autre plus ou moins rapidement.


Malgré ça, nous ne perdons pas espoir, on se dit que le vent de Nord va logiquement casser la houle du Sud (elle n'était pas uniquement du Sud sinon, c'eût été trop facile, nous avions à ce moment là une houle croisée et rapide, donc : le bordel !), et que d'ici ce soir, tout ça serait calmé, et que nous allions pouvoir naviguer avec un vent portant tranquillement.


Voyant que la houle ne se calme pas, Jean-Luc décide de rentrer la Grand Voile, et de ne fonctionner qu'au Génois (Voile assez grande à l'avant du bateau), qui lui, n'est pas sur la bôme, et donc empêche tout empannage.


La navigation est en effet sympa, les nuages sont derrières nous, le ciel bleu devant, on se dit que c'est gagné !

Ah, Ah, Ah ! (c'est ce qu'à du penser la Mer Méditerranée à ce moment là)


Vers 20h, notre AIS se met à crier que nous allons croiser un bateau qui va à une vitesse folle (~20Nds = ~35Km/h), après analyse, c'est un bateau de sauvetage de Majorque.

Quelques minutes plus tard, nous voyons un bateau non loin de nous (sans AIS, au calme) qui parait naviguer, mais mal.

Nous gardons notre cap, et dès que nous arrivons à sa hauteur, il craque sa fumée de détresse ! (C'était la première fois que j'en voyais une craquée hors du Stade Vélodrome, imaginez ma stupeur !)

Hésitant à se diriger vers lui, nous nous apercevons que le navire de sauvetage vu juste avant se dirigeait vers lui, et donc afin de ne pas causer de problèmes d'identification, nous décidons de continuer notre route, en gardant un oeil sur lui, et sur le bateau de sauvetage.

Puis le bateau de sauvetage qui allait à fond, s'arrête à quelques mètres de nous, et nous contacte via la VHF dans un espagnol tellement rapide que je me suis demandé si c'était une langue humaine. Les seules choses que j'ai pu répondre sont "Es la otra embarcacìon !", puisque j'imaginais que c'était le bateau qui était à côté de nous qu'ils cherchaient.


Après et échange cordial, les voilà repartis vers l'autre navire, qui, à leur approche, craque sa 2e fusée de détresse, et les sauveteurs arrivent sur lui.

On se dit "Ouf ! Il a l'air tiré d'affaire", on se demande quand même ce qu'il a pu lui arriver, et dans la minute qui a suivi, nous voyons un hélicoptère arriver de nulle part ! Il faut savoir qu'à ce moment nous étions à plus de 40Miles (~65Km) des côtes, donc c'était assez étonnant de le voir à cet endroit là (j'ai aussi eu le luxe d'apercevoir sur l'AIS un joli avion, lui qui ne représente que des triangles en guise de bateau habituellement).


Cette affaire porte un petit coup à Zazou, on se dit que la Méditerranée ça peut être dangereux des fois.

Mais, notre nav' n'est pas si horrible, malgré la houle, nous tenons le cap, et nous avançons assez bien, vu que le vent est assez régulier (~15-20Nds).

Après avoir avalé un repas rapide, nous décidons du découpage de la nuit, je prends le premier quart de 22h à 2h, puis lui de 2h à 5h, et ainsi jusqu'au petit matin.

Je suis donc seul à la barre, avec un joli ciel étoilé en guise de compagnie, et je suis assez content car j'arrive à tenir mon cap, et ne pas trop dégonfler le Génois.


Et puis, vers 23h-23h30, je vois que le détecteur de vent s'enflamme, il affiche d'un coup (quand je dis d'un coup, c'est à peu près 3s, donc vraiment "d'un coup"), un vent de 45Nds (~80Km/h) !


Sans hésiter je réveille Jean-Luc, le prévenant que je venait de prendre un coup de vent à cette vitesse, et que ça puait un peu.

Dans la minute qui suit, la pluie se lève, et pas qu'un peu, le vent, lui ne baisse pas, je maintient le vent à nos fesses, afin de ne pas faire trop giter le bateau.

Giter signifie faire "pencher" le bateau, c'est ce qui arrive quand un vent de travers vient pousser sur les voiles. C'est habituellement bon car c'est synonyme de vitesse, mais il faut faire attention car si le vent souffle trop, le bateau peut risquer de chavirer.


Quand la grêle est arrivée (2 minutes après, qui ont paru en être 20), là j'ai senti que c'était pas bon, ça sentait le gros orage à plein nez (faut dire que jusque là, j'étais pas sur), et suivant la grêle, un gros coup de vent jusqu'à 55Nds nous tape en plein travers.

La bateau gite comme pas possible, je me retrouve quasiment à la verticale et le bateau quasiment à l'horizontale et moi en train de forcer sur la barre comme un damné pour essayer de remettre le vent à nos fesses, mais rien n'y fait, le vent est trop fort, et face à cette force le bateau ne réponds plus.

Cet épisode a duré à tout casser 1 à 2 minutes, mais cela m'a paru diablement long.


Puis, le vent est "redescendu" à environ 30-40Nds, la gite a diminué (un peu), et j'ai pu remettre le vent à nos fesses (dans ces moments là, mieux vaut ne pas penser au cap), Jean-Luc est sorti est a repris la barre, on s'attendait tous les deux à ce que ça continue.

On rentre le génois afin de n'avoir qu'un "Mouchoir de poche" à l'avant, et en cas d'un nouveau coup de vent, nous serons moins malmenés par ce dernier.


Après une petite demi-heure, voyant le vent diminuer peu à peu, et que l'orage était derrière nous, Jean-Luc me dit d'aller me sécher et me reposer et qu'il ferait la nuit. C'est aussi à ce moment là que nous avons décide que nous n'irions pas jusqu'au côtes, mais jusqu'à Ibiza, afin de trouver un abri face aux orages (car il faut dire que ça pétait dans tous les sens autour de nous).

Petit point GPS : Pendant cette courte période, nous avons quasiment reculé, nous nous étions rapprochés des côtes de Majorque, le choix d'Ibiza était donc le plus judicieux.


Je vais donc me coucher, et vers 2h je me lève afin de voir Jean-Luc, et je le trouve à la barre excédé, il me dit que 10 minutes après que je soit allé me coucher, le vent était redescendu jusqu'à 5Nds, et que la pétole continuait !


Petit Point GPS 2 : On a quasiment pas bougé en 2h


Le vent remonte jusqu'à 20Nds environ, et vers le cap cette fois-ci ! Et, le bon côté des orages c'est que ça aplatit la houle !

Donc, plus de houle, un vent qui nous amène ou on veut, serait-ce un rêve ?

Je retourne me coucher, et je me lève vers 5h, et cette fois-ci je trouve Jean-Luc sous un torrent de pluie (il y avait littéralement un rideau de pluie sur la mer), tous les deux nous nous sommes demandés ce que nous avions fait à la Mer pour avoir mérité autant de coups bas.


Néanmoins, c'est ensuite sans accrocs que nous sommes arrivés à Santa Eularià, petite ville du nord de l'île d'Ibiza, à laquelle nous nous sommes mis à l'abri (et au calme) au port.


Au final, la morale c'est quand même que c'est le bordel cette mer, maintenant, on active les options "Orages" dans toutes les météos que nous regardons, mais apparemment les orages maritimes sont difficiles à déceler donc nous ne pourrons pas y couper !


Nous gardons en tête de quitter la Mer Méditerranée le plus rapidement possible, car en effet, comme il est dit partout, plus on avance dans l'hiver, moins elle est clémente.


Espérons que l'Océan sera quant à lui plus sympa avec nous, et nous permettra de vraiment naviguer !


Il faut noter que ma perception de l'orage est peut être un peu biaisée car dans le feu de l'action je n'ai pas vraiment pris le temps d'observer l'environnement ^^'. De plus, il aurait fallu à ce moment là affaler le Génois pour que nous arrêtions de giter, mais je n'ai pas trop pris le temps de réfléchir, et je ne voulais pas trop faire de bêtises !